Une Maraude à Bordeaux : témoignage (France)

Volontariat Social

Les maraudes, la rencontre avec les autres et avec soi-même

C’était ma première fois. Relevant au bond la proposition d’une collègue de l’accompagner à une maraude, me voilà parachutée dans un univers qui m’intrigue, me fait peur et m’intimide.

Au moment où nous sortons du lieu de rencontre, il se met à tomber des cordes. Qu’à cela ne tienne, ceux qui vivent dans la rue subissent les intempéries tout comme nous. Loïc fut notre premier contact. Un jeune gars qui fait la manche, un franc parler, a beaucoup à nous apprendre. Sa réalité quotidienne m’apparaît comme une violence permanente et je commence à me demander si je suis capable de regarder cela en face !

Dépasser ses appréhensions

Nos interlocuteurs suivants sont en groupe, tous avec un look de punk. J’ai un premier mouvement de recul lorsqu’Angie, l’encadrante de la maraude, nous propose d’aller à leur rencontre. Ils me font peur. Mais le naturel d’Angie pour entrer en contact me rassure. Je reste en retrait, je dois me faire violence pour aller leur serrer la main. En retrait dans un premier temps, je laisse faire mes acolytes, qui proposent des sandwichs et de la soupe, prétexte pour enclencher le dialogue.

Moi, avec mon café, je n’intéresse personne à ce moment là… Alors prendre une place rien que parce que c’est moi ? Je ne suis pas sûre de l’attrait que cela représente ! Les premiers moments d’adaptation passés, un contact se fait avec une « punkette » très sympa, soucieuse de protéger son petit chiot et sa mère. En fait, c’est plutôt simple, le premier pas faitrs. Je me détends. Le groupe grossit. Des « collègues » de nos nouveaux amis nous rejoignent. Solange, une jolie jeune femme, nous aborde. Elle cherche à manger pour ses 3 enfants. Elle me touche au cœur. Elle cherche des infos, des points d’appui, des relais pour nourrir ses enfants. Je trouve mieux ma place, j’ai des infos à lui communiquer. Elle qui est venue sur la pointe de pieds nous solliciter se détend aussi, se livre un peu, par petites touches. Elle nous témoigne sa reconnaissance. Je commence à me sentir utile. Nous nous quittons sur ces quelques mots échangés, pas évident de partir en laissant l’autre dans cette situation précaire…

Accueillir ses faiblesses

Sous l’impulsion bienveillante d’Angie, nous nous jetons à l’eau, Geneviève et moi, pour aller à la rencontre d’un couple de personnes âgées. Ils ont déjà reçus un colis alimentaire par une autre association. Ils ont aussi du café. Décidément, je n’ai pas de succès ! Ils voudraient du thé. Pas de chance, on n’en a pas ce soir. Et la conversation s’instaure. J’ai beaucoup de mal. Geneviève est plus discrète. Moi, je « sèche ». Je ne sais pas bien quoi dire. Lorsque Geneviève a l’idée de parler de leur chien (ils nous ont demandé des croquettes), le sujet d’échange est trouvé. C’est plus fluide. Mais c’est difficile de parler de tout et de rien sans aborder les questions qui pourraient indisposer. Leur histoire, leur parcours, leur vie… Le principe de la maraude est d’apporter de la chaleur humaine et de permettre le maintien d’un lien social digne, pas question de curiosité mal placée, le poids de la misère doit être déjà bien lourd. On ne va pas l’alourdir, nous sommes là pour tenter de l’alléger pendant quelques minutes si possible !

Nous finissons par rentrer, trempées jusqu’aux os. Nous nous posons et débriefons sur notre expérience. Ce moment est tout aussi riche, car chacun dévoile son ressenti et les prises de conscience que ces rencontres ont pu produire. Nous sommes au cœur de l’humain, de l’humilité. Avec l’accompagnement délicat, sincère et naturel d’Angie, nous commençons à faire vraiment connaissance, les unes des autres, mais aussi de nous-mêmes.

« L’action bénévole, désintéressée, bénéficie à ceux qui la reçoivent et impacte le cœur de ceux qui la prodiguent ». Un bénévole depuis 30 ans

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